Lettre n°9

La Circulaire du 7 avril 2006 relative au lancement du volet « Performance » du projet de Loi de finances pour 2007 nous renvoie à la dimension essentielle de la LOLF : la mesure et l'amélioration progressive de la performance du service public. Parler de « performance », tous les ans, dans le cadre des procédures budgétaires, voilà l’apport fondamental de la Loi organique : transcender le dialogue strictement financier des conférences budgétaires pour entrer dans un échange sur « quels moyens pour quelle qualité de service public ? » lors des nouvelles conférences « performances ».
Ces conférences se tiendront entre avril et mai, afin de préparer le débat d’orientation budgétaire qui aura lieu au Parlement au mois de juin. Il s’agira pour les ministères de définir, avec les services du budget, les stratégies de performance (objectifs, leviers d’action et résultats escomptés) présentés sous les différents axes : efficacité socio économique, qualité de service et efficience, dans l’optique d’un véritable contrôle de gestion.
Il est courant de constater que le langage de la performance ainsi employé engendre parfois, dans nos établissements, des réactions de rejets : il nous a donc semblé utile, à l’occasion d’une réflexion sur la performance et le contrôle de gestion dans le secteur public, de faire un peu le tour de ce vocabulaire.

Intéressons nous tout d'abord au sens du mot efficience, qui nous vient de l’anglais « efficiency » et qui se définit selon le Larousse comme une « capacité de rendement ». Mais l'efficience dans la LOLF n'est pas un simple rapport qualité/prix. Ainsi, dans la vision qu'en a notre Ministère, affichée par Jean-Marc Monteil lors du séminaire "LOLF et Pilotage" du 21 mars 2006", cette efficience répond à une approche plus large, correspondant à la qualité obtenue, rapportée aux conditions de sa réalisation : coût de mise en œuvre mais aussi situation initiale et contexte local particuliers au regard d’une finalité d’intérêt général.
Et c’est bien ainsi qu’il importe de saisir la « performance » dans l’action publique : si le RMI a un coût, il n’a pas à proprement parler de « rendement » mais c’est une action qui atteint à finalité car la Nation a voulu que la misère soit atténuée par la solidarité. Dès lors, l’amélioration de la performance de ce dispositif, ce n’est pas diminuer ces versements parce qu’ils ne seraient pas productifs mais c’est chercher à s’assurer que les personnes les plus démunies bénéficient au mieux de cette solidarité nationale.
C’est là une particularité du contrôle de gestion public par rapport au contrôle de gestion privé : la prise en compte, de manière centrale, de ce qui est qualifié d’externalités dans une entreprise (conditions sociales ou environnementales par exemple). Car aujourd’hui, si des entreprises se soucient d’écologie ou de commerce équitable, il n’en demeure pas moins que leur objectif est de vendre au mieux leurs produits. Vendre dans des conditions plus ou moins équitable, en effet, mais vendre tout de même car il en va de la survie de l’organisation. Les organisations publiques n’ont pas la même finalité : leur survie dépend de leur capacité à répondre aux besoins que dicte l’intérêt général. Ainsi, le service public peut fournir des prestations de services à perte, si l’intérêt général commande d’offrir des conditions à certains publics. Cependant, le niveau de l’endettement et du taux de prélèvements obligatoires du pays, et les effets économiques qu’ils induisent, ont conduit à intégrer la recherche d’optimisation des dépenses dans les préoccupations d’intérêt général.

Ce qui compte en premier lieu, dans le contrôle de gestion public, ce n’est donc pas la rentabilité (retours aux apporteurs initiaux en termes financiers) mais l’optimisation de la qualité de service public au regard des moyens que les contribuables lui affectent (retours aux apporteurs initiaux en termes de qualité de services).

Autre particularité de ce contrôle de gestion public, expérimentée à l’occasion du PLF 2007 et annoncée dans la circulaire du 7 avril : le fait que contrôle cherche à mesurer non seulement l’efficacité des dépenses budgétaires mais aussi des dépenses fiscales (réductions ou crédits d’impôts). En effet, le pouvoir de lever l’impôt étant réservé à la puissance publique, elle seule peut se soucier de cette efficacité.
Pour notre ministère, l’expérimentation portera sur le crédit d’impôts en faveur de la recherche [1], pour lequel seront définis des objectifs et des indicateurs.

Toujours au sujet de ce contrôle de gestion, faisons encore un peu de sémantique : le mot de « contrôle » est parfois mal perçu, compris comme renvoyant à un contrôle de police, à une inspection. Il est regrettable que l’autre sens du mot ne soit pas retenu, pourtant lui aussi bien français et que l’on retrouve dans « prendre le contrôle du véhicule » ou « contrôler ses émotions », le sens du pilotage et de la maîtrise : le contrôle de gestion, ce n’est pas l’inspection de la gestion, c’est la maîtrise, le pilotage de la gestion. Espérons que, bientôt, le mot ne fera plus peur à personne dans les établissements.
A ce propos, dans le cadre d’un partenariat entre l’ESEN [2] et l’AMUE, une enquête de l’INTEC [3] a été diffusée au mois d’avril à tous les établissements afin de connaître l’état d’avancement de leurs démarches de contrôle de gestion. La réponse à cette enquête est des plus importantes pour les prochaines actions que nous mènerons ensemble afin de vous accompagner dans la mise en œuvre de la LOLF : nous aurons besoin les uns des autres dans un futur presque immédiat.

En effet, il est temps que le contrôle de gestion entre dans sa dimension opérationnelle, y compris au sein des opérateurs que nous sommes. Car la performance dans la LOLF, ce n’est pas qu’un langage, c’est aussi une obligation constitutionnelle. La circulaire qui fait l’objet de cet édito nous le rappelle en citant les termes de la décision du Conseil Constitutionnel au sujet de la Loi de finances pour 2006 [4]. Cette décision relève notamment que « les retards et déficiences » constatés en matière de documentation des indicateurs « devront être corrigés » à la fois dans leur nombre et dans leur ampleur. Cette décision montre que les plus hautes instances contrôleront bien la sincérité des administrations dans leur contrôle de gestion : le mauvais pilotage est désormais anticonstitutionnel !

[1] Annexe 5 du Dossier Technique de la circulaire du 7 avril 2006 « Expérimentation : La performance des dépenses fiscales »

[2] Ecole supérieur de l’Education Nationale, Service à compétence nationale du MENESR

[3] Institut National des Techniques Economiques et Comptables, CNAM

[4] Décision n°2005-530 DC du 29 décembre 2005, (en ligne sur le site du Conseil Constitutionnel : http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2005/2005530/index.htm )

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